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Sunday, August 7, 2011

Avis de tempête sur les marchés financiers internationaux

.Rétrogradation du rating de la dette américaine par l’agence de rating Standards & Poors  le 5 août de Triple A à AA+, mettant fin à 70 ans de confiance incontestée dans le dollar; convocation d’urgence du G7 décidée le 6 ; effondrement réel ou clamé des dettes grecque, portugaise, irlandaise, espagnole, italienne… et américaine, toutes culminant dans la même semaine ; crise de l’Eurogroupe ; nouvelle mise en cause de l’existence même de l’Euro ; critique inédite par Jean-Claude Trichet gouverneur de la Banque Centrale Européenne de la situation économique américaine qualifiée clairement de nettement moins bonne que celle de l’Union Européenne ; riposte immédiate, indignée et coordonnée de Wall Street et des medias financiers américains vilipendant Jean-Claude Trichet et une Europe à genoux qui n’a de leçons à donner à personne… il y a là tous les ingrédients de la réalisation d’un film financier catastrophe sur le modèle de la Tour Infernale, du Jour d’Après-demain, ou d’Independence Day. On pense aussi au Jour le Plus Long, pourquoi pas à un futur Wall Street Brûle-t-elle ?
Peut-être cette fois ne s'agit-il pas d’une fiction mais du possible scenario apocalyptique souvent redouté par les financiers et les économistes du monde entier : une incertitude économique et financière internationale généralisée et durable. Une volatilité extrême.

On croyait en avoir fini avec la crise des subprimes, l’effondrement de Lehman Brothers et celui d’AIG. On pensait les attaques structurelles contre l’Euro devoir appartenir au passé d’une année 2010 tourmentée. On imaginait bien que le Congrès et le Président des Etats-Unis allaient finir par remonter le plafond de la dette US comme ils l’avaient fait 60 ou 70 fois depuis cinquante ans, sans pourtant croire à l’inévitabilité du psychodrame qui s’est déroulé pendant de longues semaines sous nos yeux pour culminer dans un accord de dernière minute au soir du 31 juillet dernier.

L’accélération dans l’enchainement des causes et des conséquences a stupéfait les places financières.

Jeudi dernier a vu l’effondrement des bourses asiatiques, européennes et américaine, pour plus de 4%, cumulant une perte de valeur supérieure à 10% en moins de deux semaines de cotations.

La Banque Centrale Européenne s’est réunie d’urgence ce dimanche, une réaction inédite pour une banque centrale ; une réaction qui d’ailleurs adresse un signal mixte : s’agit-il d’une réunion visant à apaiser les marchés ou bien d’une réunion de nature à accroitre l’inquiétude générale ?

Du côté des pays subissant et participant à la panique, on notera entre autres et avec intérêt les Allemands et le gouvernement de Berlin qui doutent de l’efficacité financière des Italiens et de leur capacité à effectuer les reformes structurelles nécessaires à rétablir la confiance.  

C’est assez regrettable car ce sont les Euros allemands qui sont censés fournir les Euros italiens qui font défaut au Trésor italien. Rome n’est plus dans Rome. Berlin non plus.     

A propos de Rome d’ailleurs: la Maison Blanche ne décolère pas des audaces de Standards & Poors et poursuit l’agence de rating de sa colère médiatique et politique ; et elle le fait savoir. Ce qui crée un précédent. Il est courant que les mal notés soient mecontents. Ils l’est moins qu’ils manifestent publiquement leur désaccord et réclament une révision de la note.

C’est le Japon qui vient au secours de Bons du Trésor américains en déclarant dimanche matin que les Treasury Bonds sont encore très attractifs. La raison de cet engouement déclaré : les Japonais sont après les Chinois les plus grands détenteurs de Bons du Trésor américains. Critiquer la valeur de ces Bons du Trésor serait dévaluer de facto leurs propres avoirs.

Finalement donc, c’est en louant les titres des autres qu’on préserve ses économies à soi.

La valeur financière des instruments financiers internationaux jusqu’ici les plus liquides se mesure désormais à l’intérêt direct de leurs détenteurs. Cela n’est pas sans rappeler les agences de rating critiquées par le Congrès des Etats-Unis en 2008 pour leur participation à l’inflation artificielle de la valeur et de la notation afférente des Mortgage Backed Securities, les fameux instruments financiers mêlant les subprimes aux prêts immobiliers solides pour les vendre astucieusement en triple A au monde entier. Avec les résultats qu’on connaît.

A ce jour et à l’heure qu’il est personne ne peut sérieusement prédire ce qui va se passer.  L’histoire d’un nouveau monde économique et financier est en train  de s’écrire sous nos yeux. Rien de moins.

L’agence de presse Thomson Reuters le disait aimablement il y a quelques heures : Wall Street a pressé cette semaine le Panic Buton – littéralement le Bouton de la Panique – et a survécu.

Qu’en sera-t-il cette semaine ?


Olivier Chazoule